Pour lutter plus efficacement contre les atteintes à l’environnement, notre système doit absolument changer. Nos modèles actuels épuisent les ressources, polluent les sols, les cours d’eau et l’atmosphère, et nuisent à l’environnement autant qu’à notre santé. Tout est à revoir : nos modes de production, de transport, de distribution, de construction. En tant que citoyens, nous devons également remettre en cause notre mode de consommation. En France, au fil des gouvernements successifs, le paysage juridique s’enrichit de lois visant à encourager le changement. Parmi elles, la loi Garot de février 2016 est relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire. En février 2020, la loi AGEC y ajoute la notion d’économie circulaire. Mais que prévoient ces lois ? Et comment se définit l’économie circulaire ? Quel modèle sociétal en résultera-t-il ? On vous en dit plus sur la loi anti gaspillage pour une économie circulaire.

Qu’est-ce que l’économie circulaire ?

Savez-vous qu’il existe un Institut National de l’Économie circulaire ? Ses membres ont pour ambition de transformer notre modèle économique pour le rendre vertueux. En effet, la croissance économique ne doit plus être synonyme d’épuisement des ressources naturelles et de pollution. Pour cela, il faut encourager la création et la mise en place de nouveaux modes de production, de nouveaux services, générateurs de nouvelles filières et de nouveaux emplois.

Vers un nouveau modèle économique

Le réemploi, la réparation et le recyclage doivent être pris en compte dès la conception d’un produit, afin d’allonger sa durée d’utilisation et son impact sur l’environnement. Le produit doit faire partie d’un cercle vertueux afin que :

  • Sa fabrication ;
  • Son utilisation ;
  • Son entretien ;
  • Son recyclage ou sa destruction soient non polluants.

À l’issue, la réutilisation ou le recyclage des composants facilitent également la gestion des déchets, autre gros point noir de notre système actuel. Un produit en fin de cycle, trop dégradé pour être utilisé ou recyclé, doit pouvoir être valorisé énergétiquement, utilisé en méthanisation ou en compostage.

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Utiliser les objets sans les posséder

Donner une valeur à l’utilisation d’un objet et non à l’objet lui-même pourrait être le nouveau credo. La logique économique actuelle veut qu’un objet soit acheté avant d’être utilisé. La valeur de cet objet est donc liée à sa possession et non à son utilisation. Mais pourquoi ne pas tout simplement utiliser un objet plutôt que le posséder ? Cette pratique présente pourtant plusieurs avantages, à plusieurs échelles.

●     Au niveau environnemental

La mutualisation de l’utilisation d’un objet permet d’en fabriquer en moins grosses quantités, ce qui entraîne :

  • Une diminution du volume d’exploitation des ressources ;
  • Une diminution des pollutions liées à la fabrication ;
  • Une diminution des déchets en fin d’utilisation.

●     À titre individuel

Le consommateur s’y retrouve également : 

  • Il ne stocke pas un objet qu’il utilise ponctuellement ;
  • Il ne gère pas son entretien ;
  • Louer l’objet lui revient moins cher que de l’acheter.

C’est également à nous, en tant que consommateurs, de modifier nos habitudes. Penser que l’achat d’un produit crée obligatoirement un déchet et ne doit pas être automatique. Emprunter des livres à la bibliothèque, louer des jouets à la ludothèque, réparer au lieu de jeter, miser sur des appareils de qualité qui durent plus longtemps, acheter en vrac pour diminuer l’utilisation des emballages, acheter local pour limiter les transports sont autant de gestes qui sont à la portée de tous.

Exemple de modèle d’économie circulaire : la location de vélos

Prenons l’exemple d’un loueur de vélo. Il est dans son intérêt de faire durer son matériel. Il va donc procéder aux entretiens et aux réparations qui s’imposent pour que ses vélos fonctionnent correctement et le plus longtemps possible. Normal, puisque tant qu’ils sont en bon état, ils lui assurent un revenu. Tout en exerçant son activité de façon lucrative et sans même s’en rendre compte, ce professionnel s’intègre parfaitement dans une logique d’économie circulaire, avec les conséquences suivantes :

  • Lutte active contre l’obsolescence programmée avec un allongement de la durée de vie des produits ;
  • Optimisation de l’usage des produits dont c’est l’utilisation qui est valorisée et non plus la possession ;
  • Diminution du volume de production, avec à la clé une diminution de la pollution et des déchets engendrés.

Qu’est-ce que la loi Agec ?

La Loi n° 2020-105 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a été promulguée le 10 février 2020. Elle affiche cinq objectifs ambitieux, visant à diminuer significativement la production de déchets liés à notre modèle économique.

Les 5 grands objectifs de la loi AGEC

●     Sortir du plastique jetable

Encourager la fin progressive des emballages en plastique par l’élargissement du commerce en vrac et l’interdiction de certains objets plastiques de consommation courante.

●     Mieux informer les consommateurs

Veiller à une meilleure information des consommateurs par la mise en place d’un logo unique de tri et par l’harmonisation des couleurs de poubelles et conteneurs et par l’obligation d’information sur la garantie légale de conformité.

●     Lutter contre le gaspillage et pour le réemploi solidaire

Lutter contre le gaspillage en interdisant la destruction des invendus non alimentaires, en instaurant la vente des médicaments à l’unité et en mettant fin à l’impression systématique des tickets de caisse.

●     Agir contre l’obsolescence programmée

Optimiser la durée de vie des produits par la mise en place d’un indice de réparabilité et d’un indice de durabilité, ainsi que par l’encouragement à un recours à l’utilisation de pièces détachées dès que cela s’avère possible.

●     Mieux produire

Cet objectif implique une modification profonde des process. Cela nécessite des actions précises, secteur par secteur, avec la création de nouvelles filières REP, destinées à élargir la responsabilité des industriels dans la gestion de leurs déchets.

Que prévoit la loi Agec ?

La loi anti gaspillage pour une économie circulaire annonce des objectifs chiffrés et adopte des mesures destinées à favoriser leur accomplissement :

  • Une réduction de 15 % des déchets ménagers et assimilés produits par habitant d’ici 2030 par rapport à 2010 ;
  • Une réduction des déchets d’activités économiques de 5 % en 2030 par rapport à 2010 ;
  • Une réduction de 10 % des déchets ménagers admis en déchetterie d’ici 2035 ;
  • Une réduction de 50 % du gaspillage alimentaire dans la restauration collective d’ici 2025 ;
  • L’emploi de matériaux recyclables dans le BTP en vue d’une réutilisation ultérieure, menant à une meilleure gestion des déchets dans la construction, la réhabilitation ou la démolition d’ouvrages ;
  • L’acquisition par les administrations et services publics de biens issus prioritairement du réemploi ou qui intègrent des matières recyclées ;
  • La création dans les déchetteries d’une zone destinée à accueillir les produits pouvant être réutilisés ;
  • La possibilité pour les collectivités d’autoriser les acteurs de l’économie sociale, solidaire et circulaire à récupérer des objets en bon état ou réparables dans les déchetteries communales ;
  • Le renforcement des pouvoirs de police du Maire concernant les dépôts sauvages ;
  • L’harmonisation des consignes de tri et le développement de nouvelles filières REP, visant à rendre le tri plus efficace.

Qu’est-ce qu’une filière REP ?

REP signifie Responsabilité Elargie des Producteurs. Inspirée du principe « pollueur-payeur », Une filière REP est un protocole de prévention et de gestion des déchets qui concerne un produit ou un groupe de produits. Tous les acteurs économiques d’une filière, qu’ils soient fabricants, importateurs ou distributeurs, sont responsables de l’intégralité du cycle de vie des produits qu’ils commercialisent, depuis leur écoconception jusqu’à leur fin de cycle de vie.

Les filières REP existantes

Bien que les REP existent sur le papier depuis 1975, la première filière REP fut instaurée en 1979 et concernait le retraitement des lubrifiants. La seconde, relative aux emballages, est apparue 4 ans plus tard. Il faut attendre 2001 pour voir la multiplication des filières REP :

  • 2001 : création de 2 filières REP concernant les piles et les produits de l’agrofourniture ;
  • 2004 : 2 filières REP sont créées, relatives aux pneumatiques et aux équipements électriques et électroniques ;
  • 2006 : 2 nouvelles filières voient le jour sur les automobiles et les papiers graphiques ;
  • 2007 : l‘industrie textile fait l’objet de la création d’une filière REP ;
  • 2009 : vient le tour des médicaments et des fluides frigorigènes fluorés ;
  • 2010 : création de la filière REP Mobil homes ;
  • 2012 : l’ameublement, les produits chimiques et les déchets de soins à risque infectieux sont concernés ;
  • 2015 : filière REP pour les bouteilles de gaz ;
  • 2016 : une filière REP est mise en place pour les navires de plaisance et de sport ;
  • 2021 : emballages de la restauration rapide et mégots de cigarettes ont leur filière REP.

Les filières REP à venir

La loi anti gaspillage pour une économie circulaire prévoit l’élargissement du champ d’application de certaines REP, comme celle de l’automobile ou celle des emballages de la restauration rapide. La loi prévoit également la création de nouvelles filières REP, telles que :

  • Les huiles usagées, qu’elles soient minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles ;
  • Les matériaux de construction,
  • Les articles de bricolage, de jardinage, de sport et de loisirs,
  • Les jouets.

Qu’est-ce que la loi Garot ?

La loi Garot, promulguée le 11 février 2016, accentue la lutte contre le gaspillage alimentaire et complète les dispositions sur le sujet inscrites dans la loi sur la transition énergétique.

La loi Garot : 2 mesures phares

Elle contient deux dispositions essentielles, qui concernent les distributeurs de produits alimentaires.

  • Les points de vente de denrées alimentaires d’une surface supérieure à 400 m2 doivent proposer une convention de don à des associations afin qu’elles puissent récupérer les invendus encore consommables ;
  • Les distributeurs alimentaires ont l’interdiction formelle de détruire ou de rendre impropres à la consommation des invendus encore consommables.

Le recyclage pour moins de gaspillage

La loi Garot insiste sur le fait qu’un produit alimentaire peut avoir une seconde utilité, voire une troisième, avant d’être considéré comme un déchet et géré en tant que tel. Pour étayer cette démonstration, la loi hiérarchise les étapes de l’existence d’un produit alimentaire :

  1. Éviter le gaspillage par des actions d’information, visant à éduquer et sensibiliser sur la question du gaspillage alimentaire ;
  2. Organiser le don ou la transformation des produits alimentaires invendus à destination de la consommation humaine ;
  3.  Si la valorisation pour la consommation humaine est impossible, envisager la conversion du produit en alimentation animale ou en ressource énergétique ;
  4. Enfin, en dernier recours, organiser la destruction du produit.

Le gaspillage est aussi une affaire individuelle. Chaque foyer peut également s’interroger sur ses pratiques et corriger certaines habitudes, pour consommer mieux.

La loi anti gaspillage pour une économie circulaire fixe d’ambitieux objectifs. Avec l’accélération de la création des filières REP, la notion d’économie circulaire fait sens. La remise en cause de nos systèmes de production laisse place à plus d’écoconception. Les designers, architectes, et autres inventeurs, créateurs de nos objets de demain, prennent conscience de l’impact de leur produit sur l’environnement. Le choix des matières premières et des composants, le cycle de vie de l’objet, son réemploi ou son recyclage sont autant de paramètres qui sont maintenant pris en compte dès la conception d’un produit. Les mentalités changent, les pratiques également, et les dispositions prises par le gouvernement sont un pas supplémentaire vers le changement.